Un regard d’ensemble
Grande Comore est la plus vaste des trois îles qui composent aujourd’hui l’Union des Comores. Vue du ciel, elle ressemble à un immense bouclier de lave figé dans l’océan Indien : un tracé noir et sinueux qui se jette dans un lagon turquoise, planté de cocotiers et de villages clairs. Dominant le paysage, le mont Karthala culmine à 2 361 m ; c’est l’un des volcans les plus actifs de la planète, avec plus de vingt éruptions depuis le XIXᵉ siècle.
Entre le ruban côtier et les pentes fertiles, quelque 400 000 Comoriens vivent au rythme de la pêche, des cultures d’épices et du vrombissement discret des alambics d’ylang‑ylang. La capitale Moroni, posée sur la côte ouest, concentre mosquées aux minarets élancés, ruelles swahilies et un petit port où boutres et vedettes se croisent à l’aube.
Des sultanats au jeune État comorien
Ngazidja a longtemps été un escale prospère sur la route des Indes : marchands perses et arabes y accostaient dès le Xᵉ siècle, apportant l’islam et une architecture de pierre corallienne. Aux XVIᵉ‑XVIIIᵉ siècles, l’île se divise en sultanats rivaux qui s’affrontent puis s’allient tour à tour. En 1841, la France annexe Mayotte ; en 1908 elle met officiellement fin aux sultanats de Grande Comore et transforme l’île en colonie directe.
Après la Seconde Guerre mondiale, la capitale administrative est transférée de Dzaoudzi (Mayotte) à Moroni, accentuant le rôle politique de Ngazidja. Le 6 juillet 1975, Grande Comore proclame, avec Anjouan et Mohéli, l’indépendance de l’Union des Comores. Souvent chahutée par des crises institutionnelles, l’île n’en demeure pas moins le centre politique et économique du pays ; chaque ruelle de Moroni porte encore l’empreinte d’une histoire cosmopolite où influences swahili, arabe, malgache et française cohabitent.
Paysages et sites emblématiques
L’ascension du Karthala est une expérience inoubliable. On quitte Moroni vers 4 h du matin pour entamer un sentier qui traverse d’abord des plantations d’ylang‑ylang puis des forêts humides, avant de déboucher sur un plateau lunaire. Au bord du cratère elliptique (4 km sur 3 km), l’odeur de soufre imprègne l’air et la vue s’ouvre, par temps clair, jusqu’à Mohéli : une véritable marche sur la peau de la terre.
Sur la côte nord, les coulées basaltiques ont sculpté des piscines naturelles et des plages aux reflets anthracite ; Mitsamiouli et Chomoni offrent un contraste saisissant entre sable noir, corail pâle et eau turquoise.
Plus au nord‑ouest, Itsandra dévoile d’anciens bastions portugais et un village de pêcheurs réputé pour son hospitalité, tandis qu’au sud‑ouest Iconi expose sa citadelle de lave, vestige de la résistance aux raids malgaches du XIXᵉ siècle.
Activités incontournables
Au‑delà du trek volcanique, Grande Comore se vit côté mer : snorkeling parmi les tortues vertes au large de Chomoni, sortie pélagique pour traquer le marlin à la canne ou plongée dérivante sur la passe du Dragon, où les raies aigles virevoltent dans de superbes canyons coralliens.
Sur terre, une journée dans les médinas d’Itsandra ou d’Iconi est l’occasion de déguster un café vert torréfié à la cardamome et d’observer les « portes arabes » richement sculptées. Les photographes apprécieront la lumière rasante de fin d’après‑midi sur les maisons blanchies à la chaux, tandis que les ornithologues guetteront le drongo du Karthala, un oiseau endémique à la queue en cimeterre.
L’île sert aussi de base pour des excursions d’un à deux jours vers Mohéli ou Anjouan grâce aux avions de Royal Air ou d'R Komor, ce qui permet de combiner plages, jungle et culture.
Spécialités et savoir‑faire
Grande Comore est le règne des senteurs : la moitié des fleurs d’ylang du pays sont cueillies sur ses pentes volcaniques avant d’être distillées dans de hauts alambics de cuivre. Le pays fournit encore 60 % de la production mondiale d’huile essentielle d’ylang‑ylang, ingrédient majeur de la haute parfumerie.
Dans les marchés de Volo‑Volo, la vanille, la cannelle et le girofle côtoient le manioc, la banane plantain et d’énormes thons rouge vif. En cuisine, le poulpe au coco cuit longuement dans un lait épais parfumé au curcuma et au gingembre, tandis que le pilao (riz épicé) accompagne poissons grillés et poulet braisé. L’artisanat se distingue par des paniers en feuilles de raphia, des bijoux en argent ciselé et des tissus chiromani aux motifs géométriques.
Conseils pratiques
Le climat est tropical : saison sèche de mai à octobre (23‑27 °C), saison des pluies de novembre à avril (jusqu’à 30 °C). Prévoyez un coupe‑vent pour l’altitude du Karthala et un répulsif anti‑moustiques toute l’année. Les coupures d’électricité sont fréquentes : une power‑bank est indispensable. Pour circuler, louez un 4×4 avec chauffeur ; la route circulaire présente des nids‑de‑poule mais offre des panoramas volcaniques grandioses. Enfin, les habitants étant majoritairement musulmans, épaules et genoux couverts sont de mise dans les villages ; un simple « Assalamu alaykum » brise la glace et ouvre les portes de cette île fière et chaleureuse.